SYLANS, ON TOURNE!
Vu et photographié par Eric

J’aurais juré avoir vu ma belle Slim Blue imperceptiblement frissonner en ouvrant la porte de son garage en ce Samedi 12 Avril au matin. Effectivement la chute du mercure par rapport à la veille a été sévère. Pensez donc, moins de trois degrés! Ah mais après tout, il y avait autrefois “la semaine du blanc”, alors pourquoi pas les Samedis du froid. Et cela en fut un! En route pour les célèbres Glacières de Paris sises bien à l’abri du soleil à l’extrémité ouest du lac de Sylans sur ce qui était autrefois la seule route, bien étroite, reliant Genève à Lyon.
![]() |
![]() |
Nos 17 autos bigarrées avaient bravé les frimas matinaux pour mettre une touche de couleur dans la grisaille ambiante!
Nous arrivons sous un ciel bien chargé accompagné d’une sympathique bise qui se charge, elle, de bien faire pénétrer cette misère au plus profond de nos os. Heureusement la chaleur des retrouvailles avec les autres membres de l’ANLVA et leurs 17 autos amène une diversion bienvenue.
![]() |
![]() |
Au pied de cette longue bâtisse de pierre en ruine aux murs de 50cm d’épaisseur, notre guide (notre géniale Catherine ayant bien fait les choses bien sûr) nous explique que cette aventure démarra en 1864 lorsqu’un bistrotier de Nantua, à un jet de glaçon de là, observa le potentiel commercial que pouvait représenter l’exploitation, la conservation et la distribution de l’épaisse couche de glace se formant en hiver sur la surface de ce lac.
![]() |
![]() |
Entre deux averses notre guide commence à nous fasciner avec ces récits sur la rudesse de l'endroit et les conditions de travail des ouvriers dont le nombre pouvait atteindre 300 répartis en deux équipes au plus fort de la saison. Ces iIllustrations proviennent d'une brochue mais l'image graphique de notre titre tirée d'une publicité de l'époque montre les différentes tâches inhérentes à la récolte de la glace vus de l'autre extrémité du lac: sciage des blocs, leur halage le long d'un long canal taillé dans la glace vers le bâtiment en arrière-plan, déblayage de la neige en surface avec des chasse-neige en V inversé tirés par des chevaux, et même pour plus de réalisme, l'inévitable chute sur les fesses d'un ouvrier en bas et à droite du dessin.
Évidemment, la récolte se fait au cœur de l’hiver au moment même où les activités rurales sont à l’arrêt, ce qui fait un apport financier plus que bienvenu aux gens du coin. Le travail est cependant très ardu et n’a rien à voir avec les “trois huit” de l’industrie que nous connaissons aujourd’hui. Non, là il s’agit plutôt d’un “deux douze”, et 7/7” qui plus est! Une équipe de jour travaillant 12 heures d’affilée avec une pose déjeuner de 45 minutes et une autre nocturne mais gagnant la royale somme de 40 centimes de l’heure par rapport à la diurne devant se contenter de 35 centimes. Tout cela pour scier la glace, la haler dans le chenal taillé au milieu du lac, puis la hisser dans le bâtiment, sans parler de l’entretien de la glace dont il faut inlassablement chasser la neige qui vient la recouvrir car celle-ci agit comme un isolant contre la froidure de l’atmosphère générale de -15 à -20°C prévalente entre Décembre et Mars.
Au début, les blocs de glace sont expédiés à Lyon et Paris par carrosses isothermiques et néanmoins hippomobiles, mais notre Joachim Moinat (le bistrotier) saisit l’occasion du prolongement de la ligne ferroviaire vers Bellegarde pour s’y faire raccorder et mieux desservir Marseille et même Alger! L’entreprise tourne bien rond et Moinat la vend en 1884 à la société des Glacières de Paris.
![]() |
![]() |
L'expédition finit par se faire par rail directement de la glacière. L'isolation thermique des parois et des toits des wagons était confiée à des "coussins" de paille qui permettaient de limiter la perte de glace à seuls 15 ou 20% à son arrivée à... Alger! Dans la photo d'époque ci-dessus à gauche l'on aperçoit le tunnel qui est aujourd'hui utilisé par le TGV Genève-Paris!
Mais voilà, le réchauffement climatique, n’en déplaise aux écolos, n’est pas une chose récente et commence à se faire sentir à Sylans vers les années 1910. L’exploitation devient moins florissante et la Grande Guerre absorbant les hommes au front finit d’achever un déclin déjà annoncé.
![]() |
![]() |
![]() |
![]() |
![]() |
![]() |
Cette fascinante visite a néanmoins aiguisé nos appétits, et nos fidèles Anglaises nous emmènent sur le bord d’un autre lac, celui de Nantua, où nous attendent des quenelles baignant dans une somptueuse sauce du même nom. Nos montures soigneusement garées dans la petite cour du restaurant “Chez Durdu” reprennent du service pour nous emmener à notre dernière étape, Oyonnax, capitale du peigne en corne, puis de la matière plastique injectée à partir de 1900.
![]() ![]() |
Dans le musée consacré à cette activité locale nous retrouvons nombre d’objets d’autrefois et désormais désuets dont on ne soupçonnait pas qu’ils aient pu venir d’ici, tels les fameux tabourets tam-tam chers à Brigitte Bardot, les plaquettes des robes de Paco Rabane, les fauteuils empilables et autres garnitures en formica des meubles de cuisine qui faisaient rage dans les années 1950 à 1970.
Comme toujours c'est avec un petit pincement aux bougies que nos autos se disent au revoir avant d'attaquer leur chemin de retour respectifs, avec une grosse pensée pour Catherine et Jean-Jacques qui ont été les architectes de cette splendide journée.
ATTITUDES...
![]() |
![]() |
![]() |
![]() |
![]() |
![]() |




















































